> Les fondements
des paysages de l'Aude
- 1. Les paysages et les
reliefs
- 2. Les paysages et la géologie
- 3. Les paysages et l’eau
- 4. Les paysages et la couverture
boisée
- 5. Les paysages et les
espaces agricoles
- 6. Les paysages, l’urbanisation
et les infrastructures
|
> Les fondements des paysages
de l'Aude
3. Les paysages et l'eau
L'Aude, fleuve majeur du département
|
Dans le Pays de Sault, l'Aude est un torrent. |
|
Dans la vallée de l'Aude, le lit du fleuve s'élargit. |
|
Le lit du fleuve est canalisé dans la plaine. |
|
Le Fresquel arrose le Lauragais, ici à Pennautier. |
|
L'Orbieu traverse les Corbières, ici à Lagrasse. |
|
La Vixiège s'écoule vers l'Atlantique, ici à Belpech. |
Le département porte bien son nom, en étant majoritairement arrosé par l'Aude. Le fleuve prend sa source au lac d'Aude à 2100 mètres d'altitude près de Mont-Louis dans les Pyrénées-Orientales. Puis il recueille pratiquement toutes les eaux du département en s'écoulant vers la mer. Seules celles de la Piège et de l'ouest du Quercorb sont récoltées par l'Hers pour alimenter l'Atlantique via la Garonne, et une petite portion des eaux des Corbières au sud-est rejoint l'Agly (Verdouble, notamment) ou se jette directement dans les étangs littoraux comme la Berre. L'Aude est ainsi alimenté par les eaux des Pyrénées, de la Montagne Noire, des Corbières, ainsi que par celles du Lauragais apportées par le Fresquel. De sa source à Carcassonne, le fleuve prend une direction sud-nord ; puis il bifurque brusquement pour s'engager à l'est vers la Méditerranée.
La carte montre un tracé du cours du fleuve bien particulier :
- de sa source à Quillan, la pente est de 33% en moyenne : c'est un torrent, alimenté par la fonte des neiges qui coupe le pays de Sault par de profondes gorges ;
- une fois creusé le défilé de Pierre-Lys dans le rebord du plateau de Sault, l'Aude s'écoule plus calmement et la pente s'affaiblit (3% en moyenne de Quillan à Carcassonne). La vallée forme alors une succession de bassins (Quillan, Espéraza, Limoux) séparés par des rétrécissements. Les eaux du fleuve sont ici gonflées en automne par les violentes averses méditerranéennes, mais aussi par l'apport hivernal des cours d'eau ''aquitains'' : la vallée forme en effet une limite climatique entre l'ouest aquitain et l'est méditerranéen ;
- à partir de Carcassonne, l'Aude débouche dans le sillon audois et s'écoule vers l'est, après sa confluence avec le Fresquel. Le fleuve suit la plaine ; il ne lui reste plus que 100 mètres à descendre sur les 100 derniers kilomètres ; la pente est inférieure à 1% et le fleuve décrit de nombreux méandres jusqu'à son embouchure, aujourd'hui située au nord du massif de la Clape.
Si l'Aude est un fleuve important, d'autres cours d'eau majeurs dessinent des paysages particuliers dans le département :
- le Fresquel, à l'ouest, est une rivière tranquille qui s'écoule dans le sillon du Lauragais et rejoint l'Aude à Carcassonne ;
- l'Orbieu ou la Berre dessinent des petites gorges et des vallées dans les reliefs des Corbières ; ces rivières, presque sèches la plupart du temps, peuvent se gonfler très rapidement, provoquant des crues importantes lors d'orages ;
- la Vixiège et l'Hers Mort constituent de petites rivières aux débits plus réguliers, qui s'écoulent au fond de vallées larges à fond plats entre les collines de la Piège.
Des morphologies de paysage dessinées par l'eau
|
Le ruisseau du Verdouble creuse des marmites de Géants et façonne un paysage de gorges inattendu au milieu des Corbières vers Peyrepertuse. |
|
Entre les collines du Minervois et l'Aude, la plaine cultivée de Marseillette remplace l'étang laissé par la mer lorsqu'elle se retire il y a 15 000 ans, depuis les travaux d'assèchement menés au début du XIXe siècle. |
|
La plaine entre Puivert et Nébias était un lac jusqu'au XIIIe siècle. |
|
Narbonne était encore située au bord de la mer au XIIIe siècle, la Clape était alors une île. |
|
La poljé d'Espezel : une large plaine agricole formée par un lac lors de la dernière période glacière. |
En contribuant à sculpter les reliefs audois qui s'étagent sur de larges amplitudes altitudinales, et en traversant des substrats géologiques diversifiés, l'eau a dessiné des paysages bien particuliers :
- les gorges et les vallées : les cours d'eau ont par endroit creusé des gorges spectaculaires dans le département :
dans le Pays de Sault ce sont le défilé de Pierre-Lys, les gorges de l'Aude, les gorges de Saint-Georges qui forment les paysages les plus remarquables, mais aussi les gorges de la Frau (site classé) qui sont les seules gorges très étroite de l'Aude a être accessibles à pied par le sentier cathare et le GR10 ;
dans la Montagne Noire, les rivières, Orbiel, Clamoux et Argent-Double, qui dévalent les pentes ont creusé des vallées en forme de V, étroites et profondes, dans les pentes schisteuses ;
dans les Corbières, les gorges de Galamus entaillent de façon spectaculaire les calcaires massifs du Jurassique, d'autres gorges plus modestes ou moins connues se dessinent ailleurs : les gorges de l'Orbieu, les gorges de Terminet vers Termes, le Verdouble vers Peyrepertuse, la Berre vers Ripaud ;
- l'étang asséché de Marseillette : au sud du Minervois, une plaine agricole drainée depuis 1808 par tout un réseau de canaux a remplacé une ancienne étendue d'eau peu profonde. Cette plaine rigoureusement plane a fait l'objet d'une vaste campagne de travaux durant quatre ans et a permis de mettre en culture l'ensemble des 2000 hectares. Un savant système permet d'inonder les terres asséchées avec l'eau de l'Aude, afin de faire redescendre le sel qui remonte sous forme de plaques blanches brûlant les cultures. Cette cuvette de sédiments salés est en effet un héritage de la mer de l'ère Tertiaire puis de l'Aude qui, avant de changer le cours de son lit, y a déposé une couche de limon. Aujourd'hui, riz et pommes sont cultivés dans une plaine irriguée et quadrillée par des haies de peupliers et cyprès, offrant une étonnante diversité parmi la monoculture de la vigne.
- la plaine de Puivert : belle transition entre le Quercorb boisé et le Pays de Sault, la plaine commandée par les ruines du château de Puivert est une large dépression perchée en altitude, au pied du rebord du plateau de Sault. Jusqu'au XIIIe siècle, cette plaine était un lac qui s'est asséché naturellement, libérant un vaste espace cultivable.
- le poljé d'Espézel, sur le grand plateau de Sault, est une large plaine formée par un lac lors de la dernière période glaciaire (voir ''les paysages et la géologie'')
- la plaine de Narbonne ne s'est réellement formée que vers le XVIIIe siècle. En effet, à l'époque romaine, Narbonne est au bord de la mer, et au XIIIe siècle, la Clape est une île et Narbonne un port. Les alluvions comblent peu à peu le golfe de Narbonne, puis les travaux de drainage et d'irrigation transforment ces terrains marécageux en plaine cultivable (voir ''les paysages et l'espace agricole''). C'est ainsi qu'aujourd'hui une étonnante plaine bocagère quadrillée de canaux et fossés, se dessine dans le Narbonnais.
Les étangs et les zones humides : caractères du littoral audois
|
Les cabanes de pêcheurs de l'Ayrolle.
|
|
Dans l'étang de Bages et de Sigean, l'étendue d'eau et les zones humides adjacentes accueillent une multitude d'oiseaux.
|
|
Gruissan village médiéval classé ''Plus beau village de France''.
|
|
Gruissan, c'est aussi une des stations touristiques programmées par le Plan Racine il y a 40 ans.
|
|
Filets de pêche sur l'étang de Bages.
|
|
Paysage des salins de Gruissan. |
Le littoral de l'Aude présente les mêmes caractéristiques que l'on retrouve sur le pourtour languedocien du golfe du Lion. Des étangs littoraux aux eaux saumâtres sont séparés de la mer par un mince cordon littoral sableux. Ces vastes étendues d'eaux lisses bordées de zones humides composent des paysages littoraux à la beauté sereine et aux luminosités particulières. Elles forment de précieux viviers indispensables à de nombreuses espèces de poissons et d'oiseaux.
Exploités par les pêcheurs et les salins, les étangs ne permettent cependant pas de dégager de gros revenus et seront longtemps blâmés pour les maladies qui s'y développent. C'est pourquoi ils ont eu si mauvaise presse jusqu'à une période très récente : ''Si, en quelques dizaines d'années, on parvenait à dessécher ces étangs, notamment en favorisant les alluvionnements de l'Aude vers les lagunes de Sigean et Gruissan, une population décuplée pourrait trouver sur les 7000 hectares récupérés, une occupation plus rémunératrice.'' (extrait du rapport sur ''l'agriculture du département de l'Aude en 1939'' par V. Pellegrin).
L'attraction pour la mer a favorisé une urbanisation le long des plages : Saint-Pierre-sur-mer, Narbonne-plage, Gruissan-plage, Port-la-Nouvelle, La Franqui et Port-Leucate sont des stations récentes (XIXe et XXe siècles), qui se sont développées exclusivement pour le tourisme balnéaire (sauf Port-la-Nouvelle qui est aussi un port industriel) en marge des villages de pêcheurs. L'exemple le plus marquant est Gruissan : le village médiéval se concentre autour des ruines de son château au milieu des étangs ; à ses côté le port de Gruissan date de 1975, tandis que sur la plage, les cabanes sur pilotis sont à l'origine des abris de vacances construits par les Narbonnais vers 1850, puis reconstruites au début du XXème siècle après leur destruction lors d'une tempête.
Le littoral est donc aujourd'hui à double facette : des berges d'étangs très préservées et des villages de pêcheurs intacts à l'arrière d'un front de mer plus aménagé, mais qui laisse néanmoins de vastes espaces de respiration, plus généreux et mieux préservés que dans l'Hérault voisin. Cette richesse des étangs et des zones humides est aujourd'hui reconnue : la création récente du parc naturel régional de la Narbonnaise en Méditerranée, depuis 2003, en témoigne. Il représente un des derniers espaces naturels de cette ampleur sur le littoral méditerranéen et constitue, comme la Camargue, une étape majeure à l'échelle internationale pour la migration des oiseaux.
La qualité des eaux des lagunes est une des principales préoccupations pour le littoral. En effet, les lagunes reçoivent les eaux douces qui s'écoulent depuis tout le département et sont donc révélatrices de tous les problèmes existant en amont. Les eaux douces polluées ou trop riches provoquent l'eutrophisation du milieu et accélèrent le comblement des étendues d'eau.
Le fonctionnement de la lagune réside par ailleurs dans un fragile équilibre entre les échanges avec les eaux marines par le biais de graus, et les apports d'eau douce par les cours d'eau. Or les étangs de l'Aude sont relativement fractionnés par des aménagements qui perturbent ce fonctionnement : les routes du littoral, notamment à Gruissan ou à Port-Leucate, mais aussi la voie ferrée et le canal de la Robine qui isolent l'étang de Bages-Sigean, ce dernier ne communiquant avec la mer que par le biais du grau de Port-la-Nouvelle.
Ces graus sont aujourd'hui pour la plupart artificiels, seuls ceux de Lapalme, l'Ayrolle et Pissevaches sont encore naturels (les derniers en Languedoc-Roussillon).
Dans l'étang de Campignol, un changement dans l'utilisation de l'eau douce en amont a entraîné la régression des roselières : elles laissent place à la sansouïre, formation végétale mieux adaptée aux eaux saumâtres, tandis que les sédiments s'accumulent et réduisent la taille du plan d'eau.
L'étang de Pissevaches possède un fonctionnement hydraulique très fluctuant dont l'ampleur et la soudaineté surprenent. En effet, il se situe à l'embouchure même de l'Aude et ne possède pas de cordon dunaire (fait rare en Languedoc-Roussillon).
L'étang de Lapalme et son lido de 8km de long forment un vaste ensemble de zones humides entre Port-la-Nouvelle et La Franqui que la voie ferrée vient scinder en deux, perturbant ainsi fortement les échanges hydrauliques.
Des aménagements hydrauliques remarquables qui valorisent les paysages
|
La rigole de la Montagne recueille les eaux qui alimentent le Canal du Midi. |
|
Le Canal du Midi et ses majestueux platanes. |
|
Le Grand Bassin met en scène la ville de Castelnaudary. |
|
Le canal de la Robine connecte Narbonne à la mer et au Canal du Midi. |
|
Les écluses, ouvrages de qualité qui participent à la valeur patrimoniale du canal. |
|
Le pont Vieux relie la Cité et la Bastide à Carcassonne depuis le XIVe siècle.
|
|
Fontaine à Counouzouls dans le Pays de Sault.
|
|
Aménagement récent qui met en scène le ruissellement des eaux de pluie recueillies dans une rigole (ruelles de Termes).
|
|
Lavoir à Caunes-Minervois.
|
Afin de servir les besoins des activités humaines, certains aménagements hydrauliques remarquables ont été réalisés et sont d'autant plus méritoires qu'ils ont eu à gérer une eau à la fois précieuse car rare mais aussi dangereuse car difficilement contrôlable dans ses débordements. Parmi ces réalisations d'envergure on pense bien évidemment au Canal du Midi, classé au patrimoine mondial de l'UNESCO, mais aussi au canal de la Robine, à de nombreux ponts, ainsi qu'aux aménagements pour mettre en valeur les zones humides ou pour irriguer les terres cultivées.
Le Canal du Midi
Le Canal du Midi, qui traverse le département, est l'oeuvre du Biterrois Pierre-Paul Riquet au XVIIe siècle. Il réalise le vieux rêve de relier l'Atlantique et la Méditerranée : les Romains y avaient déjà songé mais le principal obstacle était le manque d'eau pour alimenter le canal, appelé à s'écouler de part et d'autre de la ligne de partage des eaux, soit vers l'océan, soit vers la Méditerranée. L'Aude, par son débit trop capricieux n'était pas une source fiable. Le génie de Riquet fut d'identifier le seuil de Naurouze comme étant le point de séparation des eaux, puis de récolter les eaux de la ''Montagnette'' (Montagne Noire) et de les y acheminer. C'est ainsi qu'aujoud'hui le canal de la Montagne récolte les eaux des ruisseaux qui s'écoulent des pentes, puis les recueille dans des bassins, dont le plus important est celui de Saint-Ferréol ; de là, il les achemine jusqu'au seuil de Naurouze par la Rigole de la Plaine.
L'oeuvre de Riquet ne réside donc pas uniquement dans le Canal en lui même, mais concerne aussi l'amont, dans ce travail à la fois titanesque et subtil effectué dans la montagne : il est émouvant de le découvrir car c'est là que se trouve la ''clef'' du canal.
Aujourd'hui, les ouvrages d'art, les écluses, les ponts, les quais... de même que les majestueux alignements de platanes, constituent un paysage de voie d'eau reconnu et à forte valeur patrimoniale et touristique, le canal du Midi est ainsi classé au titre des sites et inscrit au titre du patrimoine mondial de l'UNESCO.
Dans l'Aude, les ouvrages et paysages les plus remarquables sont notamment :
- le seuil de Naurouze, qui présente les reliques d'un bassin devant être à l'origine au centre d'une ville jamais construite après l'ensablement du lac. Les structures encore en place restent encore à valoriser ;
- le port de Castelnaudary, belle composition offrant un ''tableau urbain'' depuis la vaste étendue d'eau du Grand bassin. À l'aval, discrète, se trouve la remarquable quadruple écluse de Saint-Roch, aujourd'hui curieusement non mise en valeur ;
- les quais à Carcassonne lors de la traversée de la ville entre la bastide Saint-Louis et la gare ;
- l'épanchoir de l'Argent-Double à La Redorte, qui permet au canal d'enjamber le cours d'eau : il s'agit d'un réservoir d'une cinquantaine de mètre de long qui, jouxtant le canal, sert à déverser le surplus d'eau lors des crues de la rivière. Cet ouvrage fut conçu par Vauban et réalisé par Jean David en 1693, qui, admiratif de l'oeuvre de Riquet, ne cessera d'améliorer le canal ;
- l'aqueduc du Répudre, le plus ancien pont-canal (1676-1680), qui fut imaginé par Riquet pour que le canal passe au-dessus du ruisseau du Répudre entre Ventenac-Minervois et Paraza ;
- les alignements de platanes, qui constituent une structure emblématique essentielle du canal : ils signalent le canal dans le paysage, offrent un ombrage précieux sous la chaleur estivale, limitent l'évaporation de l'eau, tiennent les berges, cadrent les ouvertures sur le paysage environnant et, par-dessus tout, diffusent une lumière particulière, jamais triste, qui signe en partie la singularité du Canal du Midi. Ce paysage serein et majestueux est aujourd'hui mis en danger par le chancre coloré qui contamine les platanes (abattage d'une centaine d'arbres entre Trèbes et Carcassonne fin 2006 au bief de Villedubert).
Le Canal de la Robine
Le canal de la Robine est une branche latérale du canal du Midi constitué de deux parties distinctes :
- le canal de la Robine en lui-même, canal de dérivation de l'Aude depuis Moussoulens jusqu'à la mer Méditerranée (Port-la-Nouvelle) ;
- le canal de Jonction entre le canal du Midi et l'Aude.
Le canal de la Robine est établi dans un ancien lit abandonné de l'Aude. Créé par les Romains, il a été utilisé pour la navigation jusqu'au Moyen-Âge, puis, quand la rivière s'est détournée de Narbonne, il a permis de poursuivre l'activité commerciale de la ville déconnectée de la mer. À la fin du XVIIe siècle, Vauban met en service le canal de la Robine tel qu'il existe aujourd'hui, avec six écluses sur 32 km. En traversant Narbonne, il est enjambé par le Pont des Marchands, un des rares ponts couverts de France.
Au XVIIIe siècle, le Canal du Midi évitant Narbonne, il apparaît nécessaire de prolonger le canal de la Robine par le canal de Jonction pour s'y relier. Sept écluses sont créées (dont une double, à Gailhousty) sur 5 km. Le canal de Jonction est mis en service en 1787.
La voie d'eau ainsi constituée est particulièrement intéressante en connectant le centre de Narbonne au Canal du Midi (Sallèles-d'Aude) et à la mer Méditerranée (Port-la-Nouvelle).
L'ensemble Canal de Jonction et Robine mesure au final 38 km et comprend 13 écluses. L'écluse-épanchoir de Gailhousty, l'écluse de garde de Moussoulens et la traversée de l'Aude, outre le pont des Marchands à Narbonne, sont autant d'ouvrages remarquables qui ponctuent son parcours.
Les ponts et ouvrages d'art
Le Pont Vieux à Carcassonne permet de franchir l'Aude qui coule entre la Cité et la Bastide Saint-Louis. Il est achevé en 1320 et jusqu'au XIXe siècle offre le seul moyen de traversée le fleuve. Ce monument de pierre de 210 mètres de long est calculé pour laisser passer les crues (l'arche centrale mesure 14,80 mètres) et remplace le passage à gué qui devient obsolète lors de la création de la Bastide au XIIIe siècle sur la rive gauche du fleuve. Il reste toujours un axe majeur de circulation piétonne qui offre une ouverture visuelle sur la Cité dominant l'Aude et sa plaine.
D'autres ouvrages d'art liés à l'eau contribuent à valoriser les paysages : le Pont des Marchands à Narbonne qui est encore couvert de ses maisons médiévales, le pont médiéval en grès ocre-rose d'Alet-les-Bains constitue un élégamment accès au village, le pont Neuf à Limoux date du XIVe siècle et connecte les deux parties du centre-ville coupé par l'Aude, le pont à dos-d'âne Saint-Marcel du Somail ...
Le petit patrimoine lié à l'eau
Dans les villages et les campagnes, le petit patrimoine lié à l'eau participe à la valorisation des paysages, de la même manière que les ouvrages d'art. Ainsi, les petites ponts, lavoirs, rigoles, fossés, arbres, chemins... sont importants et mettent en valeur les paysages du quotidien.
Dans la Basse Plaine de l'Aude, les aménagements hydrauliques importants sont aujourd'hui remarquables et rappellent les liens étroits qui unissent terre, eau et culture : ce sont notamment les martellières imposantes qui sont situées à l'embouchure des grands canaux d'irrigation.
Les bourgs et l'eau : proximité et prudence
|
Le lit de la Cesse à Bize-Minervois est un vaste espace qui peut se remplir rapidement d'eau lors des fortes crues. Avec ses murs en pierre et son pont, il représente un des éléments essentiels du village.
|
|
Les quais sur le Canal du Midi : un potentiel important du village de Paraza à valoriser.
|
|
Restauration récente des quais sur le Canal du Midi à Ventenac-Minervois.
|
|
Le Pont Neuf et les façades de Limoux au bord de l'Aude.
|
Dans l'Aude, comme sur tout le pourtour méditerranéen en général, l'eau est particulièrement ambivalente : à la fois précieuse parce que rare, mais aussi dangereuse car les débits très variables provoquent des crues dévastatrices. Les villes et villages s'implantent donc à proximité des cours d'eau mais le plus souvent à l'abri des crues : en recul, en surplomb, accroché à un relief de manière à profiter de l'eau sans en subir les nuisances.
Dans certaines villes, la traversée d'un cours d'eau a permis de composer un paysage urbain de qualité avec des quais, des façades, des promenades ou des ports : les façades sur l'Aude et le Pont Neuf à Limoux, les façades des maisons à Quillan, les terrasses et espaces publics à Caunes-Minervois, les quais et le port sur le Canal du Midi à Paraza et à Ventenac-Minervois, les quais du Canal de la Robine à Narbonne, les berges de l'Aude et les quais du Canal du Midi à Carcassonne...
Dans la basse plaine de l'Aude, les problèmes d'inondation sont aujourd'hui cruels et récurrents : ce phénomène naturel a été accéléré par la fermeture du bras du fleuve qui traversait Narbonne. En effet, il n'était plus possible de permettre aux eaux de l'Aude de transiter par le canal de la Robine : elles l'auraient rapidement colmaté, rendant la navigation impossible. Le lit du fleuve actuel, artificialisé, ne peut plus assurer la totalité du transit des eaux qui peuvent inonder la plaine particulièrement plane. Celle-ci est donc devenue particulièrement sensible aux crues. Les quelques villages, tels Cuxac-d'Aude et Coursan, à l'origine bâtis sur un léger monticule à proximité de l'Aude, mais aujourd'hui très largement étendus, se retrouvent menacés et inondés régulièrement.
Des aménagements récents purement techniques
|
Barrage anti-sel et berges de l'Aude vers l'embouchure du fleuve : des aménagements purement techniques qui dévalorisent le paysage fluvial. |
|
Le ruisseau Neuf bétonné à Aigues-Vives. |
|
Les berges de l'Aude servent de parking à Limoux.
|
|
Des abords de rivières parfois dégradés dans les villages : ici le Rebenty à Niort-de-Sault.
|
|
Un mauvais choix de matériaux dévalorise le bord de la rivière à Niort-de-Sault.
|
|
Aménagement simple du lit de l'Aude à Quillan, un cas encore trop rare.
|
|
Des rigoles maçonnées mettent élégamment en scène les eaux de ruissellement dans les rues de Quillan.
|
|
Un espace public récent au bord de l'Argent-Double à Caunes-Minervois, un exemple valorisant encore trop rare. |
L'eau apparaît encore excessivement considérée comme une contrainte dont il faut se débarrasser. Dans la plupart des villages audois, les aménagements hydrauliques reflètent la perte de culture liée à l'eau. Il semble que les nombreux exemples de maîtrise de l'eau pour le drainage de marais, l'irrigation des cultures, ou tout simplement les rigoles qui recueillent les eaux de pluies dans les rues, qui nous ont légué un riche patrimoine, ne soient pas assez souvent considérés comme sources d'inspiration pour les aménagements hydrauliques contemporains.
Les cours d'eau sont particulièrement malmenés afin de mieux les contrôler : recalibrage, bétonnage, enrochement..., tandis que les ripisylves ne sont que rarement entretenues, voire totalement rasées.
Pourtant, tous ces ruisseaux, canaux, rivières sont non seulement d'une importance écologique qui n'est plus à démontrer, mais peuvent aussi valoriser un village, présenter un attrait touristique et offrir potentiellement des lieux intéressants de promenade. Les cours d'eau forment en effet des fils conducteurs pour réaliser des parcours particulièrement précieux en offrant de l'ombre, la fraîcheur de l'eau, et en étant accompagnés d'un ''petit'' patrimoine de qualité.
Les exemples de gestion des cours d'eau et d'aménagements qualitatifs des berges restent encore trop rares. Citons-en deux :
- à Quillan, les berges de l'Aude sont accessibles et entretenues sans être bétonnées, les eaux de ruissellement sont mises en scène par des rigoles en pierres taillées ;
- à Caunes-Minervois, des espaces publics de promenade se tournent vers l'Argent-Double qui traverse le village.
|