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> Les fondements des paysages de l'Aude

  1. 1. Les paysages et les reliefs
  2. 2. Les paysages et la géologie
  3. 3. Les paysages et l’eau
  4. 4. Les paysages et la couverture boisée
  5. 5. Les paysages et les espaces agricoles
  6. 6. Les paysages, l’urbanisation et les infrastructures
> Les fondements des paysages de l'Aude

2. Les paysages et la géologie

aude géologie

Globalement, le département de l'Aude peut se diviser en trois secteurs géologiques :

  • au nord, la Montagne Noire appartient au Massif Central ;
  • au sud, du Pays de Sault aux Corbières, la géologie et les reliefs sont liés au système pyrénéen ;
  • entre les deux, une zone de sédiments tertiaires et quaternaires forme le sillon audois drainé par le Fresquel et l'Aude.


Une histoire géologique complexe

La géologie du département est relativement complexe ; les sols et les reliefs actuels sont le fruit d'une longue histoire.

A l'ère primaire, le territoire départemental est occupé par le massif montagneux hercynien. Il y a 245 millions d'années, les montagnes disparaissent par érosion ; il n'en reste que le socle ancien que forment aujourd'hui les roches profondes : granites et roches métamorphiques.
A l'ère secondaire (-245 à -65 millions d'années), ce socle est couvert par la mer au niveau des Pyrénées. D'épaisses couches de sédiments calcaires, marneux et argileux s'y déposent durant plus de 100 millions d'années.
A l'ère tertiaire (-65 à -1,65 millions d'années), la chaîne pyrénéenne s'élève et se plisse. Le socle, fortement fracturé, est porté en altitude. L'érosion dégage la couverture sédimentaire et met en relief les blocs granitiques dans la partie centrale la plus élevée. À des altitudes plus basses, cette couche sédimentaire a subsisté. Elle forme le plateau de Sault et les Corbières. Le massif de Mouthoumet, au centre des Corbières, constitue une curieuse exception en laissant apparaître en surface les roches calcaires, dolomies et schistes du massif ancien. Des paysages particuliers s'y dessinent, avec un maquis de chênes verts plus dense que dans la garrigue voisine et, en altitude, des impressions d'alpages ouverts sur les hauts sommets pyrénéens à l'horizon.

Bien que formée sur le massif ancien hercynien, la Montagne Noire ne s'est soulevée qu'après les Pyrénées. A l'ère tertiaire, le socle est recouvert d'une faible épaisseur de sédiments. Durant le tertiaire et le quaternaire, il se courbe. Puis l'érosion déblaie la couche de sédiments et révèle le socle. On le perçoit particulièrement bien dans les vallées étroites et taillées en V qui incisent les pentes aux parois sombres de schistes déchiquetés. Quant au granite, il fait une discrète apparition sous forme de boules et petits chaos isolés sur les sommets. La couverture sédimentaire apparaît au pied du massif ancien de la montagne et forme des plateaux calcaires et des cuestas de faibles hauteurs, de Carlipa à Montolieu.


L'héritage de l'ère primaire

Tors de gneiss (empilements en formes de boules rocheuses) parsemant les pelouses du Pic de Nore.

Tors de gneiss (empilements de boules rocheuses) sur les pelouses du Pic de Nore.

Murs en granite et schiste aux Martys dans la Montagne Noire. Murs en granite et schiste aux Martys dans la Montagne Noire.
Maison en granite le long de l'Aiguette avant le col de Jau. Maison en granite le long de l'Aiguette avant le col de Jau.
Muret en blocs de granite le long de l Aiguette vers Counouzouls. Muret en blocs de granite le long de l'Aiguette vers Counouzouls.
Marbre rouge de Caunes-Minervois sur les trottoirs de Carcassonne.

Marbre rouge de Caunes-Minervois sur les trottoirs de Carcassonne.

Escarpement rocheux de schiste sur les pentes de la Montagne Noire.

Escarpement rocheux de schiste sur les pentes de la Montagne Noire.


Les roches primaires issues du massif ancien apparaissent suite au soulèvement des montagnes puis à l'érosion qui les ont révélées. Elles se retrouvent dans les Pyrénées, le massif de Mouthoumet au centre des Corbières, et dans la Montagne Noire, qui se rattache aux montagnes héraultaises et forment l'extrémité sud du Massif Central, lui aussi issu du plissement hercynien. Ce sont des gneiss, schistes, micaschistes et granites.
Il s'agit de dépôts des mers de l'ère primaire, accumulés durant 250 millions d'années, puis métamorphisés, c'est-à-dire transformés en profondeur, par suite de la surrection de la chaîne des montagnes hercyniennes.

Ce métamorphisme transforme les argiles en schistes et les calcaires en marbres :

  • les schistes (en vert kaki sur la carte) se rencontrent sur les pentes de la Montagne Noire et des Pyrénées audoises, ainsi que dans le massif de Mouthoumet. Ils accueillent une végétation plus luxuriante de maquis que les garrigues des sols calcaires car ils retiennent mieux l'humidité. On les retrouve sur les murs des maisons dans la Montagne Noire, parfois mélangés avec du granite dans les Pyrénées, ou du calcaire dans les Corbières. Les schistes sont particulièrement spectaculaires sur les pentes de la Montagne Noire où les ruisseaux ont taillé des vallées en V caractéristiques de cette roche, dessinant des paysages noirs et hérissés de roches pointues ;
  • les marbres sont présents dans le Minervois, à Caunes-Minervois, village réputé pour ses carrières de marbre variant du rose pâle au rouge sang ; il est exploité dans la carrière du Roy depuis le XVIIe siècle. Faute d'apercevoir du marbre dans le paysage, on pourra l'admirer dans de nombreuses églises du département ou en pavement des places, notamment à Carcassonne, et jusqu'à Versailles (au Grand Trianon notamment).

Les gneiss sont des roches qui ont subi un métamorphisme plus important que les schistes, et les granites sont issus du magma refroidi en profondeur :

  • les gneiss (en vert kaki sur la carte) apparaissent autour de Saissac et sur le Pic de Nore où ils froment des tors de gneiss, empilements de boules rocheuses ;
  • les granites (en rouge sur la carte) constituent l'ossature profonde de la Montagne Noire ; ils restent discrets dans le paysage, apparaissant essentiellement dans les pentes du Cabardès vers Montolieu et sur les plateaux des sommets. On retrouve du granite dans les constructions, notamment aux Martys mélangé aux schistes, ou à Montolieu mélangé aux calcaires. Côté pyrénéen, les sommets du Madres et du Dourmidou sont aussi constitués de granites, où les blocs sont visibles dans les pentes, mais aussi dans les constructions traditionnelles.


L'héritage de l'ère secondaire

Les falaises de calcaires marins du Crétacé dans le défilé de Pierre-Lys.

Les falaises de calcaires marins du Crétacé dans le défilé de Pierre-Lys.

Les calcaires massifs du Jurassique et du Crétacé apparaissent dans les falaises rocheuses des gorges de Galamus. Les calcaires massifs du Jurassique et du Crétacé apparaissent dans les falaises rocheuses des gorges de Galamus.
Maison en granite le long de l'Aiguette avant le col de Jau. Exploitation de la dolomie dans la carrière de Sainte-Colombe.
Marnes du Crétacé supérieur mises à nu par l'érosion vers Duilhac-sous-Peyrepertuse. Marnes du Crétacé supérieur mises à nu par l'érosion vers Duilhac-sous-Peyrepertuse.

Le plateau de Sault, les Hautes-Corbières, les Corbières orientales et jusqu'à la montagne de la Clape, sont constitués de calcaires hérités de l'ère secondaire : toute la région est alors couverte par la mer et les dépôts sédimentaires marins s'accumulent, formant des épaisseurs considérables de calcaires, issus des animaux vivant dans ces mers chaudes et peu profondes :

  • les calcaires du Jurassique (en bleu sur la carte) forment une crête solide le long d'une faille est-ouest qui se retrouve sur la limite départementale sud. Ses calcaires durs apparaissent à nu dans les falaises impressionnantes des gorges de Galamus. Ces mêmes calcaires se retrouvent le long de la faille nord pyrénéenne barrant le sud du plateau de Sault et dans les Corbières orientales où ils dessinent les paysages gris clairs caractéristiques des garrigues, notamment autour de Fitou ;
  • les calcaires du Crétacé (en vert clair sur la carte) constituent le socle du plateau de Sault, des Hautes-Corbières, du Massif de Fontfroide et de la montagne de la Clape. Ces roches massives de couleur claire, presque blanche, dessinent des falaises remarquables dans la Clape, le rebord du plateau de Sault, le défilé de Pierre-Lys.

Cette épaisseur de calcaire favorise la formation de paysage karstique bien particulier :

  • très poreux, le calcaire ne retient pas l'eau qui s'écoule dans les failles, favorisant des paysages plutôt secs, tel qu'on les voit dans les Corbières orientales où la roche mise à nu affleure sur les pentes, donnant cette teinte blanchâtre très caractéristique des garrigues ;
  • le calcaire est dissous par l'eau qui forme de nombreuses grottes, notamment la grotte d'Aguzou près de Fontanès-de-Sault ;
  • dans les Corbières et le Minervois, la garrigue pousse sur les sols issus de roche-mère calcaire ; l'alternance garrigue-maquis révèle le passage du calcaire aux schistes (voir chapitre "les paysages et la végétation''), bien lisible lorsque l'on passe des plateaux du Minervois (vers Caunes-Minervois) aux pentes schisteuses de la Montagne Noire ;
  • ces calcaires parfois dolomitisés, sont des roches à la patine blanche ou grise, qui jaillissent de la végétation méditerranéenne et qui caractérisent les paysages des garrigues.

Dans le paysage, les calcaires du Crétacé et du Jurassique sont souvent très proches, voire imbriqués et il est difficile de les distinguer. C'est le cas par exemple sur les parois des gorges de Galamus.

D'autres dépôts se forment dans la mer du Jurassique :

  • les dolomies se sont formées par précipitation de dolomites (minéral composé de calcium et de magnésium) qui se déposent dans les lagons de la mer du début de l'ère primaire. Les calcaires dolomitiques apparaissent sur le Plateau de Sault sous la forme de blocs calcaires ruiniformes caractéristiques : des rochers gris se séparent les uns des autres, dessinant des ruines naturelles. Ces mêmes formations se retrouvent dans le massif de Mouthoumet et sur les bas des pentes de la Montagne Noire. La dolomie est notamment exploitée dans la carrière de Sainte-Colombe, dans les gorges de l'Aiguette ; pure et blanche, elle est essentiellement utilisé pour fabriquer des revêtements de sols, peintures et enduits ;
  • des marnes s'accumulent dans les fonds ; des grès et des calcaires sont intercalés dans les marnes : on peut notamment observer cette succession vers Cucugnan où des marnes jaunes sont mises à nu sur les pentes raides, ou apparaissent entre les rangs de vignes.


L'héritage de l'ère tertiaire

Marnes près de Monze sur les pentes de la montagne d'Alaric.

Marnes  près de Monze sur les pentes de la montagne d'Alaric. Ces roches sédimentaires marines sont ravinées par l'érosion et très reconnaissables à leur couleur gris bleu dans les Corbières.

Marnes ravinées sur les pentes du Val de Dagne.

Marnes ravinées sur les pentes du Val de Dagne.

Argiles rouges près de Laure-Minervois.

Argiles rouges près de Laure-Minervois. Sous un climat chaud, certaines roches calcaires sont transformées en argile et libèrent du fer qui leur donne cette teinte étonnante dans le paysage.

Les calcaires massifs du Crétacé inférieur et du Jurassique dessinent une longue échine entre l Aude et la vallée du Fenouillèdes.

Les calcaires massifs du Crétacé inférieur et du Jurassique dessinent une longue échine entre l'Aude et la vallée du Fenouillèdes ; ici vue depuis le château de Peyrepertuse. Le Grau de Maury, véritable brèche dans cette muraille, est bien visible. Au premier plan, le Sarrat du Bac au pied duquel s'appuie Cucugnan.

Le Pech Bugarach

Le Pech Bugarach : des calcaires massifs du Jurassique (-200 millions d'années) chevauchent des marnes tendres du Crétacé inférieur (-100 millions d'années).

étang d Ouveillan dans une dépression au milieu des calcaires lacustres du Pliocène

Vers -14 millions d'années (Miocène puis Pliocène) des calcaires lacustres se déposent dans des lacs vers Argeliers ; ici l'étang d'Ouveillan dans une dépression au milieu des calcaires lacustres du Pliocène.

Durant l'ère tertiaire, des mouvements tectoniques importants vont fortement modifier le relief de la région. À partir de - 45 millions d'années, la chaîne pyrénéo-provençale va naître et s'étendre, comme son nom l'indique, des Pyrénées à la Provence. Dans le même temps, le plissement pyrénéen s'effectue. Dans les Corbières, les marnes sont surmontées de grès côtiers puis de conglomérats continentaux qui dévalent des torrents érodant les montagnes toutes jeunes ; ils sont formés de galets arrachés aux Pyrénées en pleine surrection. Ces conglomérats sont les  "poudingues de Palassou", des roches composées de galets plus ou moins gros collés les uns aux autres par un ciment gris naturel. On les retrouvent notamment dans les Corbières, le Razès, la Malepère et la Piège sur les pentes ravinées où ils forment des microfalaises parsemées de galets.

Le serrage entre les plaques tectoniques se poursuit et va bientôt entraîner le plissement des roches et même leur chevauchement. Dans les Pyrénées, la haute chaîne est séparée de la zone nord-pyrénéenne par la ''faille nord-pyrénéenne'', que l'on perçoit aujourd'hui dans le Pays de Sault en passant des schistes aux calcaires (vers Sainte-Colombe-sur-Guette notamment). L'avant-pays est plissé mais peu déformé : nord des Corbières, Quercorb, Razès, Malepère et Piège.
Ce serrage des plaques entraîne la déformation des roches qui sont fortement compressées. Il va jusqu'à provoquer :

  • un chevauchement des roches le long de la faille qui court au sud du département et dessine la grande échine qui passe par Quéribus, le Pech de Bugarach et les falaises du rebord du Plateau de Sault. Dans les Corbières, ce phénomène a provoqué un accident tectonique encore bien visible dans le paysage d'aujourd'hui :  au niveau du synclinal des Fenouillèdes, les calcaires du Crétacé inférieur et du Jurassique chevauchent les marnes plus récentes du Crétacé supérieur. L'exemple le plus marquant est le Pech de Bugarach où la masse des calcaires massifs du Jurassique coiffent les marnes plus tendres du Crétacé, dessinant un sommet rocheux et découpé qui repose sur des pentes plus douces ;
  • un déplacement des nappes rocheuses du sud vers le nord, dans la partie nord des Corbières. Ainsi, la montagne de la Clape, qui appartient aux Corbières, s'est vue transportée de plusieurs dizaines de kilomètres, l'isolant totalement du restant du massif. Les autres reliefs du littoral sont issus du même phénomène : île Saint-Martin, île Saint-Lucie, Cap Romarin, plateau de Leucate, Caussagues...

Vers - 40 millions d'années, des montagnes s'élèvent sur tout le golfe du Lion. Mais tandis qu'à l'ouest et au centre de la chaîne des Pyrénées les reliefs continuent leur montée, à l'est l'histoire de la formation de la Méditerranée interfère avec celle de la chaîne pyrénéo-provençale qui s'affaisse autour du golfe du Lion.

Vers - 30 millions d'années (Oligocène), tout le secteur montagneux du golfe du Lion commence à s'effondrer : le bassin méditerranéen s'ouvre. Des failles apparaissent et sont responsables de cet affaissement des reliefs. Au niveau des Corbières, leur direction NE-SW limite les fossés d'effondrement de Portel et de Tuchan-Paziols (unité de paysage n°15), qui se remplissent de dépôts grossiers qui forment les sols très caillouteux favorables à la culture de la vigne ; on retrouve ces gros galets dans les murs des constructions.

Vers – 18 millions d'années, la mer miocène s'avance largement dans les terres par les fossés d'effondrement des failles. Les eaux marines alimentent des lagunes où se déposent gypse et sel, notamment en Camargue, mais aussi vers Narbonne (gypses de Portel). Les massifs côtiers de la Gardiole et de la Clape constituent alors des îles.

Puis vers -14 millions d'années (toujours au Miocène) la mer se retire complètement. Sur les terres émergées, des lacs et rivières vont parfois s'établir. Ainsi des calcaires lacustres se déposent vers Argeliers ; ils forment notamment les reliefs du village d'Ouveillan où une cuvette enserre un ancien étang salé délaissé par la mer. Le même phénomène concerne l'étang de Marseillette situé dans une cuvette des reliefs du Bas-Minervois (voir ''les paysages et l'eau'') ; aujourd'hui asséché, l'étang est devenu une plaine agricole fertile. Avec la fermeture du détroit de Gibraltar vers -6 millions d'années, la Méditerranée s'assèche à plusieurs reprises. Puis vers -5 millions d'années (Pliocène) le niveau remonte largement (la mer s'étendant alors jusqu'à 20 kilomètres au sud de Lyon).


L'héritage de l'ère quaternaire

Le lido est une étroite bande sableuse séparant les étangs de la mer, ici à la Franqui.

Le lido est une étroite bande sableuse séparant les étangs de la mer, ici à la Franqui.

La plaine d'Espezel sur le plateau de Sault est une grande dépression fermée ou poljé, formée par un lac lors de la dernière période glaciaire.

La plaine d'Espezel sur le plateau de Sault est une grande dépression fermée ou poljé, formée par un lac lors de la dernière période glaciaire.

La vallée en V creusée par la Clamoux dans les schistes.

La vallée en V creusée par la Clamoux dans les schistes.

les gorges du Ripaud vers Fontjoncouse.

La gélifraction peut former des éboulis dans les Corbières : ici les gorges du Ripaud vers Fontjoncouse.

La falaise du Pech Fraysse est un paysage karstique.

La falaise du Pech Fraysse est un paysage karstique. Il s'agit d'un lapiés, un paysage déchiqueté et accidenté, formé par l'infriltration de l'eau dans les fissures de la roche.

Durant l'ère quaternaire, l'érosion des montagnes, qui a débuté dès leur formation, se poursuit. Elle va créer les paysages que nous connaissons. C'est essentiellement le travail de l'eau qui va sculpter le territoire, des sommets au littoral.

Les changements de climats s'accentuent : des périodes froides "glaciaires'' succèdent aux périodes chaudes ou tempérées. Les refroidissements entraînent l'installation de grands glaciers, notamment sur les sommets des Pyrénées.
Dans les montagnes plus basses, la gélifraction va fortement éroder les reliefs : l'eau qui s'infiltre dans les fissures des roches augmente de volume en se transformant en glace ; la pression fait alors éclater la roche et la fragmente en débris.
Aujourd'hui encore, cette érosion est toujours active. Dans les hauts sommets des anciens cirques glaciaires, les parois se couvrent de grands tabliers d'éboulis, visibles près du Pic du Bernard Sauvage. Plus bas, même sous climat méditerranéen, les quelques jours de gel suffisent à créer dans les Corbières et garrigues des éboulis à vif, non couverts par la végétation. On les retrouve dans les Corbières et la Clape où ils forment des tas de cailloux gris très instables qui s'écoulent sur les pentes, bien visibles dans les gorges du Ripaud vers Fontjoncouse.

Dans les calcaires, depuis le Pays de Sault jusqu'aux Corbières, la roche est sujette à un phénomène discret mais important : la dissolution du calcaire par l'eau chargée de gaz carbonique. Ce gaz combiné avec l'eau donne de l'acide carbonique qui attaque les roches calcaires en dissolvant le carbonate de calcium. Cette dissolution produit les formes topographiques très accidentées des reliefs karstiques. L'eau s'infiltre dans les fissures et les élargit, formant des lapiés, paysages rocheux et accidentés bien visibles sur les pics rocheux des Corbières, notamment sur le sommet de la Montagne de Tauch, au Pech Fraysse, où les calcaires dolomitiques se détachent en blocs dessinant une falaise morcelée.

Dans le Pays de Sault, cette dissolution des calcaires s'est parfois concentrée et a formé des "puits'' en creux qui gardent la neige jusqu'en juillet. De beaucoup plus grande taille, le ''poljé'' d'Espézel est une grande dépression fermée, creusée par dissolution du calcaire, qui accueillait un lac lors de la dernière période glaciaire alors que les eaux ne pouvaient pas s'infiltrer en totalité dans la roche.

Quant au curieux gouffre de l'Oeil-Doux dans le massif de la Clape, il s'est formé à la suite de l'effondrement d'une cavité souterraine et offre aujourd'hui un regard naturel sur la nappe phréatique proche du niveau zéro.

Le ruissellement de l'eau agit aussi très fortement et creuse les vallées et gorges que l'on peut observer aujourd'hui. Le creusement du lit de la rivière s'accompagne d'autres phénomènes d'érosion tels que le ravinement et l'éboulement qui dessinent les vallées en V que l'on retrouve en particulier dans les schistes de la Montagne Noire : la Clamoux, l'Orbiel et l'Argent-Double.
Dans les Pyrénées et les Corbières, les rivières ont parfois taillé de véritables canyons dans les roches massives, peu sensibles à l'érosion par ravinement ou éboulement. De beaux et spectaculaires exemples peuvent s'observer dans les gorges de l'Aude ou de Galamus qui tranchent les calcaires du Secondaire et du Tertiaire.

Sur le littoral, après l'effondrement qui a formé le golfe du Lion, le niveau de la mer évolue encore entre – 15000 ans et – 4000 ans. Puis le niveau marin connaît une relative stabilité. Les cordons littoraux, formés de galets et de sables, se forment et évoluent encore de nos jours. Il suffit pour s'en convaincre d'observer l'évolution du littoral à Narbonne :

  • à l'époque romaine, Narbonne était au bord de la mer, l'Aude se jetait alors dans un golfe au niveau de la ville ;
  • au XIIIe siècle, la Clape est une île, la mer remonte jusqu'à l'étang de Capestang ;
  • au XIVe siècle, des canaux sont creusés et l'Aude est divisée en deux bras, l'un allant vers Narbonne, l'autre se dirigeant vers le golfe de Vendres ; le comblement s'effectue et va créer la plaine actuelle ;
  • au XVIIIe siècle, la plaine s'est largement développée, rattachant la Clape au continent ; le bras sud de l'Aude est creusé en canal (le canal de la Robine), tandis que le cours naturel du fleuve se dirige vers Vendres. Au niveau de Celeyran, l'Aude est canalisée jusqu'à la mer, au travers de l'étang de Vendres qui s'étendait alors jusqu'au pied de la Clape.


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