Atlas des paysages - Diren Languedoc-Roussillon
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> Les fondements des paysages des Pyrénées orientales

  1. 1. Les paysages et les reliefs
  2. 2. Les paysages et la géologie
  3. 3. Les paysages et l’eau
  4. 4. Les paysages et la couverture végétale
  5. 5. Les paysages et l'espace agricole
  6. 6. Les paysages, l’urbanisation et les infrastructures
> Les fondements des paysages des Pyrénées orientales

5. Les paysages et l'espace agricole

espace agricole

Des paysages agricoles contrastés par l'addition de cultures sèches et irriguées, de cultures de plaine et de montagne

Verger de pêchers dans le Riberal ; ici vers Millas. Prairies de fauche dans le Capcir ; ici vers Puyvalador. Vignes sur le piémont du belvédère de Força Real surplombant la plaine irrigué du Riberal.
Cultures sous serres dans la vallée de la Têt. La plaine du Tech vue depuis le piémont des Aspres : la multiplication des structures arborées et vergers dessine un paysage fermé le long du cours d'eau.

Les paysages agricoles sont particulièrement contrastés à l'image du territoire des Pyrénées-Orientales. Le climat et l'eau sont les deux paramètres majeurs influençant la diversité agricole. C'est ainsi que se juxtaposent des cultures sèches, notamment la vigne, et des vergers frais et irrigués ; et un large étagement de végétation, depuis les vergers de pêchers et oliviers des plaines jusqu'aux alpages des Pyrénées.
Dans les plaines, l'irrigation joue un rôle majeur dans la différenciation des paysages agricoles. Disposant d'une pluviométrie moyenne inférieure à 700 mm par an et d'un régime méditerranéen caractérisé par des précipitations peu fréquentes, irrégulières et violentes, toute la partie est du département (Roussillon, Fenouillèdes, Conflent) connaît des périodes de sécheresse contraignant fortement l'agriculture. Le château d'eau montagnard, mis à profit par un savant système d'irrigation gravitationnelle, permet une plus grande diversité de productions et offre une alternative à la viticulture.
Les vergers sont irrigués grâce aux canaux qui recueillent l'eau à même la montagne et l'acheminent jusque dans les plaines où l'eau est distribuée dans les parcelles par des agouilles (branches secondaires). Si aujourd'hui le système s'est modernisé par le système du goutte-à-goutte, l'eau est toujours acheminée par les antiques canaux creusés à flanc de montagne. Ils produisent des paysages plus frais, arborés et verdoyants qui contrastent avec les coteaux et plaines viticoles :

  • dans le Bas-Vallespir, la vigne couvre les terrasses surplombant la plaine alluviale du Tech cultivée de vergers. En franchissant le coteau, on passe de l'ambiance arborée et ombragée des vergers à l'ambiance sèche et ensoleillée des vignes, et ce faisant d'un paysage plutôt fermé à un paysage largement ouvert ;
  • dans le Riberal, la plaine fruitière d'Ille-sur-Têt située sur la rive droite du Têt s'oppose au piémont du belvédère de Força Real où domine la vigne ;
  • dans la plaine du Roussillon : la vigne domine sur les terres sèches alors que le maraîchage s'impose dès que l'irrigation est possible, notamment autour d'Elne et de Perpignan.

Aujourd'hui, la vigne représente encore la première production agricole du département, avec 37 675 ha, malgré une baisse de 10 500 ha entre 1988 et 2000 suite aux primes à l'arrachage. Le département compte un grand nombre d'appellations produisant des vins reconnus et de qualité, dont sept Appellations d'Origine Contrôlée : Côtes du Roussillon, Côtes du Roussillon Villages, Banyuls, Collioure, Maury, Rivesaltes, Muscat de Rivesaltes.
Le maraîchage est quant à lui une spécificité roussillonnaise datant du XIXème siècle. À cette époque, le département fournissait les marchés français en primeurs grâce au chemin de fer. Depuis, la concurrence des autres pays, notamment du sud de l'Europe, a poussé les maraîchers à cultiver sous serres. Ces nouvelles méthodes culturales façonnent notamment les paysages du nord de Perpignan aux Horts et aux Jardins de Perpignan, où les serres se multiplient. Les productions légumières sont importantes et variées bien qu'elles n'utilisent que des surfaces relativement réduites : salades (environ 150 millions), tomates (40 000 tonnes), concombre (50 ha), mais aussi céleri, persil, courgette, melon. L'artichaut est exclusivement produit en Salanque avec des variétés qui s'échelonnent au cours de l'année : "violet de Provence", Blanc hyérois, Calico, Popvet et Salambô. Les bords du Tech voient la culture de la pomme de terre se développer.
Outre les contrastes offerts par l'irrigation, le climat joue lui aussi un rôle important dans la différenciation des paysages. C'est ainsi qu'entre le climat proprement méditerranéen de la plaine du Roussillon et le climat plus rude des montagnes, la production agricole varie sensiblement : vignes et pêchers laissent place aux alpages et prairies en Cerdagne et Capcir. Même si, de façon anecdotique, la commune cerdane de Sainte-Léocadie s'enorgueillit d'accueillir la vigne la plus haute d'Europe sur quelques dizaines de mètres carrés.

Des paysages agricoles magnifiés par la présence des reliefs : imbrication avec les formes du relief ou dégagement sur les horizons montagneux

Terrasses sculptant les versants des Albères sur la côte rocheuse. Vignoble du Cru Banyuls cultivé en terrasses. Peu de gall : canaux permettant l'évacuation des eaux de pluie des terrasses viticoles de la côte rocheuse. Imbrication de la vigne et du relief dans le Fenouillèdes.
Vallée du Verdouble : la vigne souligne le fond de vallée. Les silhouettes du belvédère du Força Real (à droite) et des Aspres (à gauche) constituant la toile de fond de la plaine viticole du Crest. La silhouette des Aspres vue depuis le piémont viticole ; ici vers Fourques.

Les paysages agricoles des Pyrénées-Orientales sont magnifiés par l'omniprésence des reliefs qui marquent le département :

  • soit parce que les parcelles agricoles s'imbriquent directement avec les formes du relief, sous formes de terrasses notamment,
  • soit parce qu'ils dessinent des paysages ouverts et dégagés mettant en scène la toile de fond des horizons montagneux.

L'imbrication de l'agriculture et du relief façonne des paysages parfois spectaculaires comme sur la côte rocheuse où les vignobles en terrasses du Cru Banyuls sculptent les versants abrupts des Albères, mais elle forme aussi les remarquables paysages du Fenouillèdes où se mêlent les parcelles de vignes et la garrigue, notamment sur le piémont des collines :

  • les terrasses du Cru Banyuls sont conçues afin de limiter l'érosion et de permettre l'évacuation des eaux de ruissellement ; avec le schiste composant les Albères, qui, contrairement au calcaire, ne favorise pas l'infiltration de l'eau notamment lors des violents orages de printemps et d'automne, l'écoulement de l'eau non maîtrisé détruirait les terrasses implantées sur des versants, dont la pente est souvent supérieure à 50%. Un savant système permet donc d'évacuer et de canaliser les eaux : une agouille maîtresse est installée dans un thalweg et parcourt le versant de haut en bas, puis des agouilles secondaires (transversales) en "peus de gall" (pieds de coqs) acheminent les eaux recueillies sur les terrasses et la concentrent dans l'agouille maîtresse. Les terrasses dessinent des structures horizontales qui permettent de retenir le sol et l'eau indispensables à la mise en culture, tandis que les "peus de gall" et agouilles tracent des diagonales et des verticales qui font une part de la singularité des paysages du Cru Banyuls ;
  • l'imbrication vigne/relief du Fenouillèdes dessine les paysages complexes où se mêlent les petites parcelles cultivées, les reliefs rocailleux, la garrigue ou le maquis. Les formes géométriques et colorées des parcelles viticoles soulignent les accidents du relief, mettant en valeur les replats et accentuant les coteaux. Les lignes ordonnées des ceps forment contraste avec le tumulte des crêtes rocheuses, des coteaux et collines. Le fond des vallées est généralement clairement dessiné par un tapis uniforme de vigne, alors que le piémont se complexifie par l'imbrication de parcelles cultivées avec la garrigue (ou le maquis) : vallée du Verdouble (Tautavel), couloir du Fenouillèdes (Maury), plateau de Lesquerdre, ...

Dans la plaine du Roussillon, alors que le relief est largement adouci voire absent, les vastes étendues agricoles sembleraient monotones sans la présence de la toile de fond des horizons montagneux : les reliefs qui bordent le Roussillon animent les paysages de plaine par leurs profils bleutés plus ou moins complexes et découpés : la barrière sombre des Albères au sud, les horizons successifs des Aspres et du Canigou à l'ouest, les collines et crêtes découpées des Corbières au nord.

Des formes de culture originales qui dessinent des paysages remarquables : les vergers, les plateaux agricoles de Cerdagne et du Capcir

La plaine fruitière du Riberal autour d'Ille-sur-Têt. Le vaste plateau agricole de Cerdagne. Mosaïque de cultures dans la plaine du Capcir au pied des Angles. L'élevage bovin représente l'essentiel de l'activité agricole de Cerdagne.

L'arboriculture occupe une place majeure dans l'agriculture du département, premier producteur français de pêche et nectarine avec 100 000 tonnes soit le quart de la production nationale. L'abricot  a connu une période de baisse mais retrouve un nouvel élan avec de nouvelles variétés : "Rouge", "Royal Roussillon", et "Héléna du Roussillon", particulièrement adaptés aux conditions de culture en Roussillon. Le cerisier, autrefois symbole de Céret, tend à disparaître dans ce terroir au profit de nouveaux vergers plus productifs situés dans la moyenne vallée de la Têt. De même, le pommier décline dans le Conflent au profit de vergers à meilleurs rendements situés dans la plaine. D'autres cultures ont quasiment disparu comme l'amandier ou le poirier. L'olivier, même s'il se fait rare, reste encore bien présent, notamment autour de Salses avec 69 ha. Les olives produites sont traitées dans le dernier et unique moulin du département, situé à Millas, qui produit 25 000 litres d'huile.

Les grands plateaux de Cerdagne et du Capcir forment de vastes espaces agricoles nettement délimités par les pentes des massifs montagnards. Si l'élevage (surtout bovin) est important et assure le maintien des estives dans les montagnes, d'autres types de cultures prédominent sur ces vastes plaines d'altitude. Ce sont notamment les prairies de fauche qui occupent la majeure partie des surfaces, mais aussi le maraîchage, avec notamment la culture de la pomme de terre qui se développe en Capcir, ainsi que quelques champs de céréales.
L'essentiel de l'activité agricole de Cerdagne et Capcir est tourné vers l'élevage extensif et la production fourragère : avec une majorité d'élevage bovin viande ainsi qu'une spécificité locale dans l’élevage de chevaux lourds, mais aussi la production de bovin lait et ovin viande. Les coopératives agricoles sont bien organisées (Coopérative Catalane Viande et Bétail, Coopérative laitière CIMELAIT, 20 groupements pastoraux, Coopérative Ovine des Pyrénées Orientales, ...) et orientées vers des produits de qualité : Agneau Catalan, Rosée des Pyrénées, Viandes de Qualité : veau, agneau et boeuf Cerdagne-Capcir. L'agriculture de ces hauts cantons est plutôt active et les "mesures agri-environnementales estives" ont permis de reconquérir plusieurs milliers d’hectares.

Des mutations économiques lisibles dans le paysage

Constructions récentes dispersées parmi les vergers de la plaine de Vinça. Vieux cerisiers témoignant de la production de cerises autour de Céret. Ceps de vigne arrachés vers Fourques.
Vignes arrachées et urbanisation récente. Friches sur le plateau de Roupidère.

Dans la plaine du Roussillon les parcelles de vignes arrachées et laissées en friche se multiplient. Autour des villages en pleine expansion, il est aujourd'hui courant d'observer l'avancée des lotissements et zones d'activités au détriment de la vigne. Cette situation résulte d'une mutation économique importante qui touche particulièrement le Roussillon mais se retrouve dans tout le département et même au niveau régional : la crise économique qui touche la viticulture s'accompagne d'une pression urbaine de plus en plus forte notamment autour des grandes villes et sur les zones proches du littoral. Au niveau national, une campagne de primes à l'arrachage a été mise en place afin de réduire la surproduction de vin qui engendre une baisse des coûts et des problèmes d'écoulement de la production. Le Languedoc-Roussillon est la région la plus touchée avec presque 12500 ha  concernés (4,20% de son vignoble). La région représente à elle seule presque 90% du vignoble mis à l'arrachage primé au niveau national. Proportionnellement ce sont les Pyrénées orientales qui subiraient les plus grandes pertes avec 5,30% de son vignoble mis à l'arrachage indemnisé.
En trente ans, le vignoble du Languedoc-Roussillon a perdu près d'un quart de sa superficie passant de 430 000 ha en 1975 à 287 000 ha en 2005, tandis que sa production a simultanément diminué de 50%.

Toutefois les parcelles les plus concernées se situeraient essentiellement hors des zones d'appellations contrôlées.
Les friches agricoles s'observent notamment dans la plaine du Roussillon, autour des villages, en particulier dans la partie sud au pied des Albères, mais aussi autour d'Elne, de Perpignan, et sur la frange littorale.

Plus isolé, le plateau de Roupidère connaît aussi une mutation agricole importante avec une déprise viticole quasi généralisée et la multiplication de friches. Autour du village de Montalba-le-Château, le paysage est en pleine mutation sans que l'alternative à la viticulture ne soit encore engagée.


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